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DES QUESTIONNEMENTS AUTOUR DES FILMS POUR LES TOUT PETITS. PARCE QUE LA TELEVISION S'INTERESSE A EUX, DE PLUS EN PLUS JEUNES, ET PARCE QUE LES DVD SONT NOMBREUX DANS NOS MAISONS.

La télévision (une page qui présente des avis, plutôt négatifs, autour des chaines de télévision pour les tout petits).

 

ICI LES DEUX PERCEPTIONS D'UN BEBE QUI REGARDE UNE VIDEO

"Le tout-petit comprend-il le spectacle télévisuel ?

Qu'est-ce qui attire son attention ? Imite-t-il les modèles qui lui sont proposés et de quelle manière ? Les psychologues américains ont travaillé depuis quelques décennies sur ce problème. Ils ont posé ces questions, presque dans les mêmes termes, dans une recherche concernant l'interlisibilité de l'image. Leurs options théoriques pour étudier comment le petit enfant réagit aux sollicitations du téléviseur à la maison se formulent suivant deux conceptions différentes :

•  La première décrit les jeunes enfants comme les victimes passives de la valeur marchande des médias. Ils seraient le plus souvent sans aucun pouvoir pour résister aux effets hypnotiques ou de dépendance au petit écran. Et dans le même temps, incapable de comprendre ce qu'ils regardent, le flux rapide des images animées dépassant leurs capacités à en extraire des pensées. Vraisemblablement, les dialogues sont pour eux trop abstraits, trop rapides et entrent difficilement en rapport avec leur situation familiale. Ce modèle est celui de la « télévision charabia »

•  Une seconde conception considère le jeune téléspectateur comme un chercheur sélectif et un excellent sélecteur d'information. Dans de modèle de « la télévision compréhensible par intermittence », les petits-enfants regarderaient sélectivement le téléviseur en attendant de choisir les parties du programme compréhensible par eux. D'inspiration apparemment piagétienne, cette conception s'en éloigne : elle considère l'enfant comme une sorte de moniteur qui prendrait la trace sonore pour un signal d'entrée qu'il associerait avec un contenu mémorisé.

« Mais pour ces deux conceptions, regarder la télévision est un acte individuel, privé, entre l'enfant et la machine. Celui de « la télévision charabia » élimine toute l'influence de la télévision sur l'acquisition du langage chez l'enfant. Celui de « la télévision compréhensible par intermittence » permet d'envisager des effets facilitant une fois que le petit enfant a acquis les compétences de base pour traduire le dialogue. La préférence qu'ont les enfants pour les contenus compréhensibles permettrait l'extension de leur répertoire linguistique dans certains domaines. »   (Lemish D. et Rice M.L. « Télévision as a talking picture book. : a prpo for language acquisition » Journal of Child Language, 13 (1986), pp. 251-274.)

Ces différences de conception ne me semblent pas particulièrement opposées en elles-mêmes, mais traduisent plutôt des modes d'approches différentes pour la compréhension psychologique et psychopathologique de l'enfant. En effet, deux grand courants dominent chez les chercheurs concernant l'image et le petit enfant. Le premier serait plus celui d'une psychologie bio-sociale qui s'est mise au service des recherches de santé publique qui ont longuement préoccupé gouvernement fédéral américain. Le second serait celui d'une démarche de psychologie expérimentale d'inspiration cognitiviste où la modélisation et la mise en situation sont faites artificiellement en laboratoire de psychologie. Cette démarche exclut souvent les parents de l'expérience. Elle s'intéresse principalement à la découverte des compétences du bébé et étudie comment l'outil audiovisuel peut améliorer son éducation et ses connaissances, en s'appuyant sur l'analogie existant entre le cerveau et l'ordinateur. L'intérêt du travail que nous venons de citer est que leurs auteurs ouvrent une voie peu explorée aux Etats-Unis, celle qui s'intéresse à la relation de soutien parental dans le domicile familial et, le plus naturellement possible, aux effets de langage sollicité par le visionnement télévisuel, mais d'autres voies d'approche en ce   domaine existe." 1.

 

ICI LE STADE DE DEVELOPPEMENT DU BEBE EN LIEN AVEC L'IMAGE

"Le bébé peut identifier quelques formes et certains traits du visage, mais il ne peut différencier un visage humain et les autres objets avant le deuxième mois. Il serait plus sensible aux limites du visage, à ses contours, puis à différents types d'expressions. Par la suite, il fait plus attention à l'intérieur du visage notamment aux yeux, à la bouche et au nez. (...) Il est démontré expérimentalement qu'à 6 ou 7 mois, un bébé est capable de se souvenir d'un visage pendant une semaine, même s'il n'a pu l'observer que quelques instants.

Une autre question est de savoir à partir de quel moment la forme « visage », identifiée comme telle par le petit enfant, sera par lui rapportée à une personne. Il semble que dès 2 à 3 mois, le bébé reconnaît la configuration du visage à partir de photographies de sa mère. En effet, les échanges mère-bébé sont le support de leur engagement relationnel. Pendant une première période de 3 à 5 mois, le système oculomoteur du bébé arrive à maturation. Il peut alors initier le début et la fin des contacts visuels au cours de ses relations sociales. Alors que pendant cette période, le contrôle tonicomteur reste limité aux mouvements de ses membres et au mouvement main-bouche ou main-oeil, la rencontre par le regard permet de réguler les contacts avec sa mère. Le bébé peut détourner les yeux, les fermer, les fixer ailleurs ou prendre un regard vitreux. (...)

En ce qui concerne l'audition, le nouveau-né est certainement plus avancé que pour la vision. Un bruit ou une série de sons le font sursauter ou frissonner. Puis, il est capable de ne plus y répondre. Il semble qu'a une voix plus grave, il y préfère une voix douce et aiguë, comme celle que l'on utilise souvent spontanément pour parler aux bébés. Il reconnaît non seulement la voix de sa mère, mais également sa langue et certaines structure rythmiques. Les compétences auditives du bébé vont orienter et développer ses vocalises. (...) ce n'est qu'à partir du quatrième mois que des différences formelles significatives apparaissent dans les vocalises du bébé. (...) Le nouveau-né possède également quatre cris différents pour exprimer ses sentiments : la faim, la colère, la douleur et la frustration.

On constate donc que l'activité auditive du bébé est fortement liée à sa vocalisation et que l'imprégnation culturelle commence très tôt. Il se montre capable d'autorégulation et d'expression (...)

On peut raisonnablement penser que dès la naissance de la vie psychique, le bébé exprime ses besoins et possède des aptitudes pour former des représentations abstraites à partir des premières caractéristiques de la perception. Il peut ensuite agir en fonction d'elles. L'émergence des premières représentations de nature sensori-motrice dont l'origine serait innée est d'une importance théorique déterminante car elle instaure une instance réflexive comme fondatrice de la capacité de penser, et cela bien avant l'avènement d'un stade du miroir ou la mise en place d'un schéma posturo-moteur. (...)

Il est aisé de concevoir que le visuel se transfère au toucher, mais dans quelle mesure s'opère un transfert de l'auditif au visuel ? Dès la sixième semaine, un bébé regarde avec plus d'attention les visages qui parlent. Mais si le son produit ne correspond pas au mouvement des lèvres, il préfère l'information visuelle sur ce qu'il entend. Autrement dit, à cet âge, « Le bébé entend ce qu'il voit et non pas ce qui est dit ».

Tous les faits observés par différents expérimentateurs en laboratoire, à domicile ou à l'hôpital, témoignent d'une compétence précoce du voir comme étant un phénomène actif et sélectif chez le nourrisson. Alors, bien entendu, se pose la question de ce qu'il fait ensuite de ces expériences audiovisuelles, notamment lorsqu'elles s'exercent en dehors de la relation maternelle. (...)

Maintenant, nous devons poursuivre nos investigations dans le domaine de l'imitation qui intervient au cours de la relation audiovisuelle chez le petit enfant. Selon certaines études récentes, l'imitation différée surviendrait chez l'enfant beaucoup plus précocement que dans les premières descriptions de Piaget. Ainsi, l'exploration des capacités mnésiques d'enfant de 9 mois montre qu'ils sont capables d'imiter des actions simples avec de nouveau objets, en direct comme en différé, vingt-quatre heures après la première réponse.

Lorsque l'on observe les réactions des enfants visionnant des spectacles télévisuels, on   peut utiliser le test d'imitation directe et différé pour évaluer dans quelle mesure ces bébés sont capables de diriger leur propre comportement. Déjà, on avait mis en évidence que des enfants de 14 mois pouvaient reproduire des actes perçus à la télévision, même lorsqu'ils étaient présentés par un inconnu utilisant un objet non familier, comme cela peut se passer à la maison. Ainsi, la télévision pouvait servir de modèle d'action pour ces enfants. Dès l'âge de 6 mois, certains enfants sont capables de reconnaître des similarités entre des vues à deux ou trois dimensions. Par conséquent, le visionnement télévisuel qui se déroule en deux dimensions ne perturbe pas les actions des enfants qui ont lieu dans un espace en trois dimensions. (...)

De quelle manière la télévision influence-t-elle le développement du langage chez le petit enfant ? Peut-on considérer comme certains auteurs qu'elle est une sorte de livre d'images parlant ? Une étude longitudinale sur une période de 6 mois à domicile, concernant des enfants de 6 mois à 2 ans et demi, a tenté de répondre à cette question. Pendant le visionnement télévisuel en présence des parents, de nombreuses interactions verbales sont observées, mettant en évidence que cette présence est stimulante. Au cours de premières étapes de l'acquisition du langage, la désignation des objets, des animaux ou des personnages est fréquemment pratiqué par les enfants comme par leurs parents. On remarque également d'autres formes de verbalisation comme pointer en questionnant, questionner sur le contenu de l'émission, répéter une phrase ou décrire une situation. Les parents des plus jeunes qui pointent et dénomment les personnages ont ainsi tendance à soutenir l'attention de leur enfant par ces appels. Parfois, lorsque les enfants de 20 mois à 2 ans se mettent à parler, le commentaire des parents tend à inclure des questions, des répétitions et des descriptions. Ils répondent ainsi aux commentaires de leur enfant. La télévision apparaît alors comme un médiateur des échanges verbaux entre l'enfant et ses parents.

Mais la constatation selon laquelle la télévision peut être un élément enrichissant pour l'acquisition du langage chez le petit enfant ne peut en aucune manière prendre une valeur universelle du fait du dispositif lui-même. Certes, l'observation se fait dans le lieu de vie habituel de l'enfant et me semble plus naturelle que dans le laboratoire. Cependant, l'objet de la recherche, c'est-à-dire le langage, est isolé et valorisé comme mode de communication par rapport à tous les autres modes infraverbaux. Dans le contexte des relations familiales, et en particulier le soutien maternel agissant, le dialogue s'enrichit par ce que cette expérience apporte de nouveau. Cette expérience télévisuelle semble donc, dans ce contexte, analogue à la lecture d'un livre d'image, lecture que ces familles pratiquent couramment à d'autres occasions.

Or, l'expérience clinique nous montre que les pratiques familiales sont le plus souvent très différentes de celles qui viennent d'être décrites. Même en présence de petits enfants, la télévision fonctionne en flot continu et l'enfant est souvent un spectateur solitaire, même si parfois il s'associe avec ses frères et soeurs, ou avec les enfants de la nourrice. S'ils sont plus âgés que lui, ce sont eux qui lui imposent leur programme. Le bébé regarde souvent tout, y compris les programmes des parents les plus osés, car il est réputé être encore trop petit pour comprendre. Dans ce contexte, les interactions sont radicalement différentes : pas de holding parental, pas de commentaires verbaux qui assurent un cadre à l'expérience audiovisuelle habituelle, aucune censure ne s'exerce à l'égard du contenu, le temps passé devant l'écran est rarement limité.

(...) L'engagement que sollicite l'image télévisuelle chez le petit enfant implique le développement langagier pour qu'il prenne véritablement un sens. (...)

À cet âge encore tendre, l'essentiel de l'expression langagière passe par la dénomination des objets ou des gens. Le bébé établit à partir de la réalité son expérience visuelle, auditive, mais aussi gestuelle et kinesthésique, des rapports de signifiants à signifié Pour instaurer ces rapports, il dispose de l'imitation, de la représentation puis de la dénomination. Il commence par faire connaissance avec le personnage ou l'objet culturel. Pour cela, il faut d'abord découvrir l'inconnu, et par la répétition de cette rencontre, la mémoriser et acquérir enfin la permanence de l'objet. C'est à ce prix que l'expérience et son contexte sont mémorisés et prennent une valeur significative. Pendant ses 16 premiers mois, l'enfant n'est pas encore suffisamment équipé pour associer les représentations elles-mêmes, il vit tout « ici et maintenant », ce qui le mobilise affectivement.

Il nous faut donc bien distinguer l'expérience de la réalité et l'apprentissage qu'en tire l'enfant. Reconnaître quelque chose, un personnage ou son image, ce n'est pas savoir ce que c'est, car cette reconnaissance est d'abord globale, même si elle repose sur des aspects formels. Dire à l'enfant : « C'est bien lui, tu le connais ! », ce n'est pas lui apprendre ce qu'il fait. C'est la narration imagée qui lui montre l'action : de quelle manière, pourquoi et, bien entendu, comme dans toute tragédie classique, où quand et comment ? Par exemple, dans leurs observations, Lemish et Rice constatent que ce sont la marque publicitaire et le slogan qui s'y rattachent qui sont appris en premier par les enfants. Or, les caractéristiques formelles de ceux-ci répondent justement aux critères que je viens d'évoquer et leur permanence vient de la répétition. La prise de parole par l'enfant engage sa maîtrise audiophonologique. Elle est un des supports pour sa compréhension et vient compléter sa lecture kinesthésique des images. La mise en mot permet aussi au petit enfant de s'exprimer et de mieux contrôler les émotions sollicitées par le spectacle." 2.

"Ce sont les particularités de la voix qui permettent aux enfants de guider leur attention visuelle en leur rendant compréhensible une partie du programme, même si celui-ci ne leur est pas particulièrement destiné. L'incidence du milieu socioculturel est forte, car mieux l'enfant maîtrise le langage, plus tôt il est aidé pour la compréhension du message télévisuel. Ainsi, il apparaît que le comportement visuel de l'enfant devant la télévision dépend du contexte physique et social au cours du visionnement. Son attention dépend également des aspects formels des produits audiovisuel présenté. Ainsi, parce que la télévision leur parle, qu'ils la comprennent de mieux en mieux et qu'ils acquièrent une meilleure capacité d'attention, les petits enfants la regardent de plus en plus. Ceci explique que de la naissance à 5 ans, le nombre de petits téléspectateurs augment considérablement.

(...) il existe une progression de l'imitation en fonction de l'évolution du petit enfant : une première période d'imitation est surtout mimo-posturo-gestuelle, puis lui succède celle de l'imitation langagière et enfin celle des intérêts culturels. Ainsi, dès avant l'acquisition théorique de l'imitation différée volontaire, le bébé est capable d'imitation momo-posturo-gestuelle, tant pour ses tâches exploratoires au laboratoire de psychologie, que dans son comportement de téléspectateur à la maison. L'image est capable de capter la sensori-motricité du bébé et de l'inciter à des imitations gestuelles ou mimiques, comme dans ses relations en direct avec autrui.

Au terme de notre réflexion, on peut conclure qu'il est nécessaire d'adapter les conditions du visionnement télévisuel pour les très jeunes enfants en assurant notamment une présence accompagnante pour que cette expérience soit positive, et en particulier lorsqu'il s'agit de programmes à visée éducative. On peut dire aussi que les conditions de réception pour le bébé doivent impérativement être contrôlées, car la télévision est inductrice de comportements et l'enfant saura d'autant mieux en profiter qu'il maîtrise le langage, le sens de ce qu'il regarde, et que tout cela dépend de son milieu socioculturel et de la qualité de son environnement affectif. De plus, il faut lui proposer des programmes adaptés à ses capacités de compréhension et ne plus lui laisser regarder n'importe quoi sous prétexte qu'il n'y comprend rien." 3.

 

 

1. "L'enfant au siècle des images". Claude Allard. Albin Michel, Paris, 2000 p.193

2. "L'enfant au siècle des images". Claude Allard. Albin Michel, Paris, 2000 p.198

3. "L'enfant au siècle des images". Claude Allard. Albin Michel, Paris, 2000 p.211

"Quelle relation se noue entre l'enfant et le nouvel univers médiatique qui s'offre à lui ? Que fait-il des images animées que proposent le cinéma, la télévision et le jeu vidéo ? Comment interfèrent-elles dans sa vie psychique ? Claude Allard, psychiatre de formation psychanalytique, spécialiste de l'enfant et de l'adolescent, tente de répondre à ces questions.
- partir de la psychanalyse, de la psychologie du développement et de la sémiologie, l'auteur montre l'importance des images et leurs effets sur l'activité psychique de l'enfant. En effet, au-delà du cadre socio-culturel dans lequel il évolue et des conditions de réceptivité propres à l'enfant, les intentions des créateurs et distributeurs de médias sont déterminantes. Ainsi, une lecture psychanalytique de dessins animés ou de films pour enfants ou adolescents fait apparaître certains ressorts cachés et les messages parfois pervers qu'ils recèlent. Et, constatant dans sa pratique clinique, un syndrome d'imprégnation audiovisuelle par overdose d'images, l'auteur met en garde les parents : les médias audiovisuels qui favorisent une déréalisation et proposent des modèles d'identification ont une influence grandissante sur la socialisation de l'enfant, et donc sur l'organisation psychique des adultes de demain."