![]() |
|||||||||
|
------------------------------------------------------------------------------ |
||||||||
Autour de la question de la place du parent quand on propose (impose ?) la télévision à l'enfant. Et comment ne pas le laisser entièrement livré à ce qu'il voit.
|
|||||||||
UNE TELEVISION BABY-SITTING, IL Y A DES RISQUES D'ABUS ET D'ABANDON "La nourrice audiovisuelle vient combler un manque On sait jusqu'à quel point peuvent aller les excès lorsque la télévision devient la baby-sitter attitrée de nombreux enfants quand les parents vont au travail ou faire leurs courses. La télévision est devenue un des principaux modes de garde d'enfant aujourd'hui, et l'abandon à eux-mêmes qu'ont à vivre la multitude de jeunes téléspectateurs, et donc le manque de présence parentale qui le marque, est supposé être compensé par le spectacle et la télé qui assure une présence fictive. La télévision devient alors un objet transitionnel, au sens winnicottien du terme, dans la mesure où l'enfant investit cet objet en l'absence de sa mère, comme compensation à ses frustrations.Son spectacle s'accompagne alors souvent de grignotage de bonbons et de gâteaux, ou de boissons gazeuses excitantes, ou même de l'usage d'un véritable objet transitionnel imprégné d'odeurs, comme le chiffon, le doudou, ou le nounours, lui-même à l'effigie d'un personnage de la télé. Mais pendant que le spectacle télévisuel occupe ses pensées, l'enfant ne pense plus au manque qu'il ressent : sans rêverie personnelle, il ne peut donc pas le psychiser, l'élaborer en images ou en mots qui lui sont propres.Bref, une telle situation est propice au vide intellectuel, à la passivité de penser, elle fait obstacle à la créativité qui préside aux phénomènes transitionnels en présence d'êtres vrais comme en leur absence. Le transfert télévisuel, source de plaisir facile, peut même instaurer une sorte d'écart à l'égard d'une réalité nettement plus frustrante, une sorte de repli dans l'imaginaire, d'où naît une confusion. C'est la déréalisation télévisuelle. Les petits téléboulimiques deviennent inaptes à la réalité des apprentissages car cette réalité est plus complexe que les situations télévisuelles pour lesquelles personne n'explique ni l'intrigue ni le dénouement." 1.
" La télévision a-t-elle libéré les parents ? Beaucoup avouent ne pouvoir s'en passer, ne serait-ce que pour les décharger ponctuellement de leurs enfants. Mais ces heures passées devant le poste, ces heures solitaires, sont-elles toujours bénéfiques ? L'abandon physique de l'enfant, assis ou couché trop près du poste, figé dans une attitude réceptive, masque d'autres formes d'abandon. Un abandon moral, puisque trop souvent il est confié à des séducteurs de l'enfance, dont la tâche est de le retenir autant que de la divertir, lui, et tant d'autres enfants. Un abandon affectif : il a parfois peur, tout seul face aux méchants qu'on lui montre, et il ne le dit pas, il ne sait peut-être pas le dire. Un abandon intellectuel : entre ce qui est irréel et ce qui est incompréhensible, comment peut-il comprendre, comment peut-il se représenter ce qu'il voit ? " 2. p.176...................................................................... "Si personne n'est là pour l'accompagner, pour lui dire de s'écarter de l'écran, pour choisir avec lui, pour dédramatiser si le besoin s'en fait ressentir, quand l'effroi le gagne, pour lui donner le sens de ce qu'il regarde ; si personne n'est là pour lui parler, pour l'écouter, pour lui proposer autre chose - eh bien, il s'habituera à la solitude. Il s'y adaptera, et il ne voudra bientôt plus des autres relations auxquelles ses parents tiennent. Il changera, il deviendra progressivement quelqu'un d'autre." 3.
Nombreux sont les moments où la télévision peut être utile aux parents. Un anniversaire et le bon moyen d'avoir une brochette d'enfants calmes un petit moment - un médicament à faire prendre, des inhalations, couper les cheveux... . L'enfant est distrait par autre chose, il ne bougera pas durant l'opération . On pourrait, c'est sûr, avoir d'autres moyens, mais celui-là demande peu d'énergie pour le parent, et fascinera l'enfant.
COMMENT PEUT-ON INSTALLER NOTRE ENFANT DEVANT UN PROGRAMME DANS DE BONNES CONDITIONS " La simple tenue d'une maison peut nécessiter une courte absence et une cassette vidéo fera patienter l'enfant jusqu'au retour de sa mère. Pour que le spectacle télévisuel ne soit pas uniquement un leurre, un ersatz parental, certaines conditions doivent être remplies. Avant La cassette aura été choisie avec le ou les parents, vue et discutée en commun. Lorsque l'enfant la regardera seul, il se souviendra du bon moment passé avec ses parents lors du choix de la cassette. Cette réminiscence émotionnelle facilitera sa créativité, permettant une activité de pensée en l'absence des parents. L'intérêt de cette conversation préliminaire réside dans l'évocation ultérieure d'un être cher, sécurisant, absent, venant en lieu et place de l'être réel. Elle procure à l'enfant le plaisir de fonctionner mentalement seul, tout en déjouant la frustration. Les angoisses de séparation n'ayant plus prise, l'autonomie de pensée en découle. Après Le retour des parents doit susciter la mise en commun du vécu de l'enfant pendant l'absence des parents. La possibilité de leur raconter, même succinctement, une « nouvelle version », c'est-à-dire une nouvelle perception et de nouvelles interrogations, permet de situer ce moment dans une continuité rassurante. L'apprentissage de la séparation se fait de cette manière, par l'anticipation de retrouvailles, dans un moment partagé où les questions des parents, alternant avec les réponses chaque fois nouvelles des enfants, participent au maintien du lien et à la connivence entre les deux générations. " 4.
ICI, UN THEME PROCHE, l'histoire, le conte du soir remplacé par la télévision du soir. "Le conte a été créé à partir de préoccupations et de conflits internes communs à tous les êtres humains, quelle que soit leur origine. Celui qui le déchiffre fait donc comme dans le rêve, un travail d'analyse. Les contes perdent ainsi leur caractère anodin, prennent un sens et une valeur symboliques. (...) Dans le dessin animé, oeuvre de création, les intentions conscientes de l'artiste, traduites par le graphisme et le récit, se doublent d'un contenu non formulé qui sous-tend l'histoire. Ce contenu, à l'instar du conte, peut comporter plusieurs problématiques. Dans Bambi : grandir et s'identifier au père ; dans le Roi Lion : prendre la place du père - problématique oedipienne. Dans de nombreux dessins animés, les relations fraternelles sont traitées à travers des fratries et également dans la compétition entre bandes rivales, ce qui équivaut à un déplacement moins culpabilisant. Le sens caché derrière ce qui est montré de façon évidente va faire réfléchir l'enfant, lui donner à penser au-delà du récit descriptif." 5. .............................................................. Dans leur contenant même, la cassette et le conte comportent de nombreux points communs. Tous deux retracent une histoire située dans un cadre imaginaire, avec généralement un point de départ suffisamment intéressant pour capter l'attention. Puis, l'un des protagonistes devient le héros du récit en résolvant l'énigme ou en dénouant un conflit. Autrement dit, le conte, comme le dessin animé, forme un tout, avec un début, un déroulement et une fin. Ce n'est donc pas à priori sur la construction du récit que le conte et le dessin animé se différencient. La fracture se situe résolument du côté du support. (Cela risque d'entraîner de l'uniformisation (on voit tous les nains de Blanche-Neige comme ceux de Disney), amener la réalité à prendre le pas sur l'imaginaire (ce qu'il voit n'est pas ce qu'il sent), une mise en retrait du langage au profit de l'image, l'absence de l'être cher comme support)" 6.
" Durant le déroulement d'une cassette, l'enfant laissé seul devant l'écran subit la fin du film. C'est pour lui une rupture brutale, l'effacement instantané de l'image extérieure dans laquelle, pendant un temps, il avait cru entrer et qui l'abandonne à sa solitude. " 7.
1. "Psychanalyse des dessins animés". Geneviève Djénati. L'Archipel, Paris, 2001 p. 220 2. "Des enfances volées par la télévision". Liliane Lurçat. François-Xavier de Guibert 2004 troisième édition, livre édité en 1995 p. 175 3. "Des enfances volées par la télévision". Liliane Lurçat. François-Xavier de Guibert 2004 p.176 4. "Psychanalyse des dessins animés". Geneviève Djénati. L'Archipel, Paris, 2001 p.191 5. "Psychanalyse des dessins animés". Geneviève Djénati. L'Archipel, Paris, 2001 p.177 6. "Des enfances volées par la télévision". Liliane Lurçat. François-Xavier de Guibert 2004 p.133 7. "Des enfances volées par la télévision". Liliane Lurçat. François-Xavier de Guibert 2004 p.140
|
|||||||||